La réglementation anti-endommagement : enjeux stratégiques et nouvelles approches

Dernière mise à jour le 24 avril 2025

De 2012 à 2025 : l’évolution de la réforme DT-DICT et ses impacts structurants

2012-2018 : les défis initiaux de mise en œuvre et les adaptations progressives

La réglementation DT (Déclaration des Travaux) –  DICT (Déclaration d’Intention de Commencement de Travaux) a été instaurée pour sécuriser les travaux à proximité des réseaux souterrains, en imposant des échanges préalables entre les entreprises de travaux et les exploitants de réseaux. 

Les principaux objectifs de la réforme sont : 

Prévenir les accidents : Éviter les endommagements des réseaux pouvant entraîner des explosions, des fuites ou des électrocutions.

Protéger les personnes : Assurer la sécurité des ouvriers, des riverains mais également de toute personne présente à proximité du chantier.

Limiter les coupures de service : Garantir la continuité de l’alimentation en gaz, électricité, eau, télécoms, etc… pendant les travaux.

Éviter les coûts liés aux réparations : Réduire les dépenses imprévues dues aux dégradations de réseaux, souvent lourdes pour les entreprises et les collectivités.

Lors de son déploiement initial, plusieurs obstacles ont freiné son application. De nombreuses entreprises du BTP ont exprimé des réticences face à une réglementation perçue comme complexe et contraignante. S

Face à ses difficultés des ajustements ont été mis en place : Les acteurs du secteur ont été amenés à mieux comprendre l’importance de cette réglementation pour la sécurité des personnes et des biens. 

Les exigences en matière de cartographie des réseaux ont été progressivement renforcées, permettant ainsi une meilleure visibilité des infrastructures existantes. 

Ces changements ont permis une adoption plus fluide et une réduction substantielle des incidents.

En effet, entre 2013 et 2017, le nombre de dommages aux réseaux a diminué de 35 %, passant de 25 696 à 16 698 !

2019-2025 : renforcement des exigences et transformation des pratiques industrielles

Depuis 2019, les exigences réglementaires en matière de travaux à proximité des réseaux souterrains se sont fortement renforcées. Ces évolutions visent à améliorer la précision des données cartographiques et à clarifier les responsabilités des différents acteurs du secteur : exploitants et exécutants.

Cette période a marqué un tournant dans l’évolution de la réglementation, avec une transformation des modes opératoires dans le secteur des travaux publics et une évolution majeure dans les pratiques industrielles.

L’une des avancées majeures concerne le géoréférencement des réseaux souterrains, avec l’introduction progressive de la classe A, qui garantit une précision de 40 cm pour les réseaux rigides et 50 cm pour les réseaux flexibles. 

Cette exigence, détaillée par l’Observatoire national DT-DICT, est essentielle pour limiter les risques d’endommagement lors des travaux, en particulier dans les zones urbaines denses.

Optimiser les investissements en détection et cartographie des réseaux

Géoréférencement de classe A : retour d’expérience économique sur plus d’une décennie

À partir de 2012, les investissements dans la cartographie précise des réseaux ont joué un rôle central dans l’optimisation de la sécurité et de la gestion des infrastructures souterraines.

plan mapping détection réseau

Le géoréférencement de classe A, qui permet une précision de localisation de l’ordre du centimètre en 2012 (entre 1 et 3 cm en planimétrie (X,Y) et de 2 à 5 cms en altimétrie), a entraîné des coûts initiaux importants, mais les bénéfices à long terme sont substantiels. 

Une évaluation chiffrée des investissements réalisés met en évidence un rapport coût-bénéfice très favorable, notamment grâce à la réduction des incidents et à l’amélioration de la planification des travaux. Les entreprises qui ont adopté cette technologie en avance ont non seulement réduit les coûts de réparation liés aux dommages aux réseaux, mais ont également gagné en efficacité et en sécurité.

Le retour d’expérience montre qu’en dépit des coûts initiaux élevés, la cartographie précise a généré des économies notables à long terme, en particulier pour les organisations avant-gardistes.

Ces données de géoréférencement améliorent également la gestion des risques et la prise de décision

Technologies disruptives de détection : l’accélération technologique au service de la conformité avancée

Plus le temps passe, plus les innovations technologiques émergent.

Aujourd’hui, il existe un panorama de technologies qui permettent de dépasser les exigences minimales pour créer un véritable avantage compétitif. 

Voici ce que l’on peut retrouver : 

  • Géoradar :  Le Géoradar est une méthode géophysique utilisée pour la prospection subsurface. Il assure une fiabilité importante dans la détection de réseaux et ouvrages enterrés.

  • IoT (Internet of thing ) : Améliore l’efficacité et la précision en connectant les outils, les véhicules et les matériaux à un système central. La gestion de la flotte devient plus rationnelle avec le suivi des véhicules et la surveillance du carburant qui optimisent les itinéraires et réduisent les coûts. 

  • Drône & l’IA : L’analyse en temps réel et la reconnaissance faciale rendent les drones de sécurité particulièrement efficaces. Grâce à l’IA, ils peuvent analyser des images en direct et repérer des menaces avec une grande précision. Ces avancées révolutionnent la gestion des risques et la sécurité des infrastructures.

Anticiper les évolutions de la réglementation : prendre un temps d’avance stratégique

Analyse européenne : les leçons des modèles performantes à l’étranger

La réglementation anti-endommagement française s’inspire de modèles européens, notamment ceux du Royaume-Uni, de l’Allemagne et des Pays-Bas

Ces pays ont mis en place des systèmes de prévention des dommages aux réseaux souterrains qui ont conduit à une réduction significative des incidents, offrant ainsi des enseignements précieux pour la France.

Modèle britannique (« Dial Before You Dig ») pour une prévention des dommages aux infrastructures  :

Le concept « Dial Before You Dig » est une initiative visant à la prévention via un service en ligne gratuit qui permet aux professionnels comme au particuliers de vérifier les infrastructures souterraines et les conduites/câbles avant de creuser. Bien que ce programme soit d’origine australienne, il a été adopté et adapté par divers pays, y compris le Royaume-Uni.​

Plus d’informations sur : https://www.energynetworks.org/campaigns/thinkbeforeyoudig

Système allemand de formation/certification et taux d’incidents inférieurs de 25% :

En Allemagne, la prévention des dommages repose sur un système de formation et de certification des professionnels. Les travailleurs doivent suivre des formations spécifiques avant de pouvoir travailler sur des réseaux souterrains. Ces formations garantissent la maîtrise des risques liés aux excavations. 

Approche néerlandaise KLIC-online et intégration dans les processus d’aménagement

​Aux Pays-Bas, toute personne souhaitant creuser mécaniquement, même dans son propre jardin, doit obligatoirement effectuer une demande de Klic

Cette procédure, imposée par la loi WIBON depuis 2008, vise à prévenir les dommages aux 1,7 million de kilomètres de câbles et de canalisations souterrains. Elle s’applique aussi bien aux particuliers qu’aux entreprises.

Les travaux concernés incluent l’utilisation de machines pour des activités telles que creuser une piscine, installer une clôture ou poser une fondation. Il est également obligatoire d’avoir sur le chantier une version numérique de la demande Klic, accessible via l’application.

Cette démarche permet d’identifier les réseaux souterrains et de contacter les opérateurs concernés en cas de besoin.​

Même pour les petits travaux, il est fortement recommandé de faire une demande pour éviter tout risque de dommage ou d’accident. 

Digitalisation et data management : valoriser 13 ans de données réseau comme actif stratégique

Une autre dimension essentielle de l’évolution de la réglementation DT-DICT réside dans l’exploitation des données réseau accumulées. 

Ces données constituent un actif stratégique pour les entreprises : 

  1. Mieux comprendre les tendances
  2. Anticiper les risques 
  3. Optimiser la gestion des infrastructures.

La digitalisation et le data management sont des leviers puissants pour transformer ces données en intelligence opérationnelle. 

En intégrant des systèmes de gestion des données avancés, les entreprises peuvent améliorer leur prise de décision, optimiser la planification des travaux et réduire les coûts liés aux réparations. 

Cette gestion des données crée un patrimoine informationnel à haute valeur ajoutée, contribuant à la mise en place d’une stratégie à long terme pour la sécurité et la gestion des réseaux souterrains.